Résumé
Les capacités de formation sont un levier majeur des politiques d’offre de soins. La réforme des études de santé portée par la Loi Organisation et transformation du système de santé de 2019 a mis fin au dispositif du numerus clausus, fixé annuellement depuis 1979 par décret ministériel et qui déterminait le nombre d’étudiants admis à entrer en formation pour les professions médicales et les pharmaciens. À partir de la rentrée 2021, ce dispositif sera remplacé par le numerus apertus, qui a pour ambition de déterminer les flux d’entrée aux études de santé de façon plus flexible et plus concertée, avec un objectif de réponse aux besoins de santé des territoires. La Conférence nationale de santé a ainsi pour mission d’élaborer des propositions d’objectifs quinquennaux de formation sur le fondement de concertations aux niveaux local et national.
L’étude de la DREES permet d’alimenter les échanges de cette conférence qui réunit l’ensemble des acteurs du monde de la santé. Organisée en 3 parties, elle regroupe les éléments d’analyse fournis lors des groupes de travail préparatoire à la conférence :
- Un panorama présentant les évolutions de la démographie de ces professions ces neuf dernières années (2012-2021) ;
- Une projection démographique à l’horizon 2050 sous hypothèse de comportements et de législation constants ;
- Une projection intégrant des variantes quant au nombre d’étudiants admis au sein des différents cursus d’études concernés et au nombre de professionnels diplômés à l’étranger qui débutent une activité en France.
Une baisse de la densité de médecins de 2,2 % entre 2012 et 2021
Depuis 2012, les effectifs de médecins de moins de 70 ans en activité sont globalement stables aux environ de 215 000, la baisse du nombre de généralistes étant compensée par la hausse du nombre de spécialistes, notamment grâce à l’arrivée importante de médecins titulaires d’un diplôme étranger. La population française ayant augmenté, la densité de médecins a quant à elle diminué de 2,2 % au cours de la période, passant de 325 à 318 médecins pour 100 000 habitants. La densité de médecins est globalement plus importante dans les régions du sud de la France. La situation de la région francilienne est contrastée avec une concentration importante en spécialistes tandis que la densité en médecins généralistes y est inférieure de 11 % à la moyenne nationale.
La densité standardisée permet de tenir compte des besoins de soins différenciés selon l’âge et donc de l’impact du vieillissement de la population. Entre 2012 et 2021, cette densité standardisée de médecins a diminué davantage (-6 %) que la densité simple, illustrant l’augmentation de la demande de soins due au vieillissement de la population (arrivée des générations nombreuses du baby-boom à un âge de forte consommation de soins). Cette diminution est particulièrement marquée pour les généralistes, dont la densité standardisée passe de 155 à 139 médecins pour 100 000 habitants, soit -10 %.
Sous hypothèses de comportements et de législation constants (scénario tendanciel), le modèle de projection de la DREES montre une stagnation des effectifs jusqu’en 2030, avant une hausse assez importante jusqu’en 2050 (+1,5 % de croissance annuelle moyenne des effectifs entre 2030 et 2050).
En revanche, compte tenu de l’augmentation de la population, ce scénario montre une diminution de la densité médicale en France dans les prochaines années. Cette baisse est encore plus forte si l’on considère la densité médicale standardisée, qui tient compte de la hausse de la demande de soins induite par le vieillissement de la population : celle-ci atteindrait un point bas en 2028 (-5 % par rapport à 2021) et ne retrouverait son niveau actuel qu’en 2035, avant de repartir nettement à la hausse (+23 % en 2050 par rapport à 2021).
Par rapport à ces tendances, augmenter de 20 % le nombre d’entrants en formation en France conduirait à combler ce creux démographique environ trois ans plus tôt et aboutirait, à horizon 2050, à une densité standardisée encore plus élevée, de +37 % par rapport à 2021.
Chirurgiens-dentistes : une croissance démographique portée par les arrivées de diplômés à l’étranger
Au 1er janvier 2021, 42 000 chirurgiens-dentistes de moins de 70 ans sont en activité. La croissance des effectifs de chirurgiens-dentistes est fortement liée à l’arrivée en France de nombreux professionnels (français ou étrangers) diplômés à l’étranger : leur part parmi les professionnels en activité a plus que triplé depuis 2012, pour atteindre près de 14 % en 2021. Parmi les professionnels s’étant inscrits à l’Ordre en 2020, 39 % détiennent un diplôme étranger. Ces arrivées ont permis de maintenir depuis 2012 une densité stable, environ 62 chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants.
La densité de chirurgiens-dentistes est particulièrement élevée en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, et plus généralement dans la moitié Sud de la France.
En supposant constants les comportements comme la législation, les projections montrent une croissance soutenue des effectifs et de la densité standardisée (+ 39 % entre 2021 et 2050) en raison de nombreuses arrivées de chirurgiens-dentistes diplômés à l’étranger (si celles-ci se poursuivent à l’identique sur toute la période de projection). Sans elles, la densité de chirurgiens-dentistes à horizon 2050 stagnerait par rapport à son niveau actuel.
Sages-femmes : la forte croissance démographique de la profession se poursuit
En augmentation constante depuis 2012 et avec une dynamique particulièrement forte jusqu’en 2017, le nombre de sages-femmes s’est stabilisé autour de 23 400 en 2021.
Sous hypothèses de comportements et de législation constants, les projections montrent une croissance continue de la densité standardisée. À l’horizon 2050, elle progresserait de 27 % par rapport à 2021. En lien avec les récentes extensions de leurs compétences, la profession connaît en outre des mutations importantes quant à son mode d’exercice : alors que 20 % des sages-femmes avaient en 2012 une activité libérale (cumulée ou non à une activité salariée), 34 % des sages-femmes sont dans ce cas en 2021. Si ces tendances se prolongent, les effectifs de sages-femmes libérales ou mixtes progresseraient de 70 % à horizon 2050.
Pharmaciens : une baisse de densité comblée en quinze ans
Au 1er janvier 2021, 72 200 pharmaciens de moins de 70 ans sont inscrits à l’Ordre et en activité, dont deux tiers exercent en officine. Ces effectifs ont connu une croissance de 2012 à 2016, suivie d’une diminution jusqu’en 2021. Les projections démographiques de la DREES montrent, à comportements et législation constants, une poursuite de cette baisse jusqu’en 2027 avant une reprise jusqu’en 2050. Toutefois, la densité en pharmaciens d’officine montre un creux plus marqué en raison de l’augmentation de la population : elle ne retrouverait son niveau actuel qu’à la fin des années 2030.
Projections démographiques à l’horizon 2050 sous hypothèse de comportements et de législation constants :
Consulter
• Les publications et données
- Cavillon, M. (2012, mars). La profession de sage-femme : constat démographique et projection d’effectifs. DREES, Études et Résultats, 791.
- DREES (2020, novembre). Projections des effectifs de médecins à l’horizon 2040. Datavisualisation.
- Millien, C. (2017, septembre). 8 000 chirurgien·ne·s-dentistes supplémentaires d’ici à 2040. DREES, Études et Résultats, 1027
- Millien, C. (2019, mars). 8 % de pharmaciens en plus entre 2018 et 2040, et une densité stabilisée. DREES, Études et Résultats, 1110.