Des dépenses de santé liées aux structures démographiques des départements
En France, en 2018, les dépenses de santé s’élèvent à 2 750 euros en moyenne par patient et varient beaucoup selon les départements : de 2 290 euros en Loire-Atlantique à 3 550 euros en Haute-Corse. Les dépenses moyennes les plus élevées se situent dans les départements ruraux du centre et du nord-est de la France métropolitaine ainsi qu’en Provence-Alpes-Côte d’Azur, en Martinique et en Guadeloupe. Les plus faibles se trouvent dans le quart nord-ouest de la France métropolitaine, en Rhône-Alpes, en Guyane et en Île-de-France.
Ces différences s’expliquent d’abord par les structures démographiques de chaque département, la demande de soins étant fortement liée à l’âge et notablement au sexe. Une fois corrigées de ces facteurs, les dépenses des départements ruraux du centre de la France métropolitaine sont proches de la moyenne nationale. Elles sont plus faibles dans le quart nord-ouest de la France métropolitaine et, dans une moindre mesure, dans le quart sud-ouest, le centre et dans les Alpes. À l’inverse, elles sont particulièrement élevées dans les départements d’outre-mer (DOM), en Corse, dans le quart nord-est métropolitain et le pourtour méditerranéen.
Des écarts liés notamment à des disparités de revenus et d’accessibilité à l’offre de soins
Les écarts significatifs de dépenses qui demeurent après prise en compte de la structure démographique reflètent notamment des disparités de revenus entre les départements. Les dépenses de santé sont ainsi un peu plus élevées dans ceux où le taux de pauvreté est le plus important. En effet, les patients les plus précaires sont susceptibles d’avoir davantage besoin de soins, même s’ils sont également les plus concernés par le renoncement aux soins. De plus, les dépenses tendent à être plus importantes dans les départements où le niveau de vie des plus aisés est le plus élevé – qui ne sont pas systématiquement ceux où le taux de pauvreté est le plus faible. Un niveau de vie plus important peut en effet permettre de diminuer le renoncement aux soins, voire d’augmenter la propension à payer pour de meilleurs délais ou un choix plus sélectif de professionnels, via des dépassements d’honoraires.
L’accessibilité de l’offre de soins contribue également significativement aux écarts de dépenses. Ainsi, dans certains départements du pourtour méditerranéen, le niveau élevé de dépenses est lié à une densité médicale importante, tandis que le niveau de dépenses est plus faible dans l’ouest de la France, où la densité médicale est plus limitée.
Enfin, les modulations géographiques des tarifs réglementaires de soins et biens médicaux dans certains départements (DOM, Ile-de-France et Corse) peuvent aussi contribuer aux disparités de dépenses. Dans les DOM en particulier, elles s’appliquent aux séjours hospitaliers et aux soins de ville, et pourraient à elles seules, par leur ordre de grandeur, expliquer le surcroît de dépenses de santé observé.
Pour les patients, des écarts de reste à charge atténués par l’Assurance maladie mais alimentés par les dépassements
L’assurance maladie obligatoire (AMO) prend en charge en moyenne 82 % des dépenses de santé en France en 2018. Les 18 % restants correspondent au reste à charge après assurance maladie obligatoire (RAC AMO), qui s’élève en moyenne à 490 euros par patient. Si cette prise en charge par l’AMO réduit nettement la dispersion des RAC moyens entre départements, les écarts restent importants : les RAC AMO moyens les plus élevés se trouvent à Paris, dans les Hauts-de-Seine, les Yvelines, le Rhône, l’Isère et les Alpes-Maritimes (voir carte). Dans les 10 départements où ils sont les plus élevés, les RAC AMO sont supérieurs d’au moins 19 % aux RAC AMO moyens des 10 départements où ils sont les plus faibles (cet écart est de 27 % pour les dépenses).
Le principal facteur de variation des RAC AMO est le montant des dépassements (dépassements d’honoraires et tarifs libres sur certains produits ou actes, non pris en charge par l'AMO), notamment ceux pratiqués par les médecins spécialistes, les cliniques et pour les soins dentaires. Le lien avec la structure démographique n’est pas établi, et c’est le niveau de vie des plus aisés au sein du département qui apparaît en réalité comme le premier facteur d’explication du montant de dépassements.
Méthodologie
Pour chaque département, les dépenses de santé et les restes à charge ont été calculés à partir des données de la base restes à charge (base RAC), produite par la DREES et alimentée par le Système national des données de santé. La base RAC inclut l’ensemble des dépenses individualisables des assurés de tous les régimes d’assurance maladie ayant consommé au moins une fois dans l’année des soins sur le territoire français. Les restes à charge sont exprimés après remboursement par l’Assurance maladie obligatoire (RAC AMO) mais avant prise en charge par une éventuelle complémentaire santé.
Afin de corriger des structures démographiques, les dépenses ont été corrigées de l’âge et du sexe grâce à une méthode de standardisation indirecte. Une régression linéaire a été utilisée pour mesurer l’influence exercée sur les dépenses par d’autres facteurs, à partir du taux de pauvreté monétaire, du neuvième décile de la distribution des niveaux de vie et de l’accessibilité potentielle de l’offre de soins.