Les médecins : démographie et revenus

Dossiers solidarité et santé (1998-2016)

N° 1

Paru le 01/01/1999

DREES

Résumé

Vingt-huit ans après la mise en place d’une limitation d’accès aux études médicales, la croissance du corps médical semble bien maîtrisée puisque le nombre de praticiens en activité a atteint, semble-t-il, un palier et devrait commencer à décroître au cours des prochaines années.

 

Entre 1968 et 1998, l’offre de soins médicale a connu deux évolutions importantes : un accroissement des effectifs très fort avec un triplement du nombre de médecins et une tendance accentuée à la spécialisation. Aujourd’hui, un médecin sur deux est un spécialiste contre un sur trois en 1968. C’est seulement à la fin des années 90 que le numerus clausus instauré en 1971 fait sentir ses effets. Le nombre de médecins commence à décroître et cette évolution sera de plus en plus rapide après 2012, sauf bien sûr augmentation notable de ce numerus clausus.

Pour Jacqueline Gottely et Annick Vilain, plusieurs tendances se dégagent pour les prochaines années. Tout d’abord, un recul de la spécialisation, lié en partie au comportement des femmes médecins, surtout les plus jeunes. Leur part ne cesse de croître : un médecin sur deux devrait être de sexe féminin en 2020 contre un sur trois aujourd’hui, un sur sept il y a trente ans. Autre tendance prévisible à moyen terme, le vieillissement sensible du corps médical, 60 % des praticiens seront âgés de 50 ans et plus en 2010. Ces évolutions pourraient poser des problèmes pour certaines spécialités comme, par exemple, l’anesthésie et la gynécologie obstétrique. Le rapport Nicolas avait déjà souligné les difficultés de recrutement de médecins anesthésistes et constaté le désintérêt des jeunes générations pour cette spécialité.

Selon Annick Vilain, la biologie est la seule spécialité non concernée à court terme par le mouvement de baisse des effectifs. Par contre, elle ne sera pas épargnée par le vieillissement puisque en 2010, un biologiste sur deux sera âgé de 50 ans et plus. L’évolution la plus notable pour cette spécialité sera la montée du nombre de praticiens ayant une formation de médecins alors qu’aujourd’hui les trois quart des biologistes sont pharmaciens.

Les disparités d’implantation du corps médical sont toujours fortes. Elles apparaissent encore plus marquées lorsqu’on analyse les densités médicales non pas selon un découpage institutionnel ou une opposition ville-campagne mais en se référant au concept d’aire urbaine, comme le font Stéphane Rican, Marc Simon, Alain Charraud et Gérard Salem. Ce zonage établi par l’INSEE permet de mieux se rapprocher des réalités urbaines et rurales.

Première constatation : les médecins spécialistes exercent de façon quasi exclusive dans les pôles urbains. C’est le cas pour 95 % d’entre eux alors que les médecins généralistes libéraux se répartissent de manière équilibrée entre espace urbain et espace rural. La médecine généraliste libérale répond donc bien, comme le soulignent les auteurs, aux caractéristiques d’une offre de premier recours. Pour les médecins généralistes, les inégalités d’implantation apparaissent essentiellement au sein de l’espace à dominante urbaine. Les praticiens marquent nettement leur préférence pour l’exercice en pôle urbain plutôt que dans la couronne périphérique. L’opposition Nord-Sud apparaît toujours aussi clairement, liée non pas seulement à une clientèle plus âgée mais aussi à des raisons historiques. Enfin, dernier constat particulièrement intéressant, la présence autour de Paris d’une large couronne sous-médicalisée reflète, selon les auteurs, l’opposition entre le centre parisien, lieu d’activités et sa périphérie plutôt lieu de résidence.

Ève Roumiguières s’intéresse pour sa part au revenu libéral des médecins qui a poursuivi globalement sa croissance. Cette dernière marque toutefois un infléchissement depuis 1992 pour l’ensemble des disciplines médicales, à l’exception notable des radiologues qui utilisent des techniques nouvelles plus coûteuses. Pour l’auteur, les niveaux de revenus des médecins se différencient significativement en fonction du degré de technicité de la spécialité. Plus les praticiens effectuent des actes techniques, plus leurs revenus sont élevés. À l’inverse, le groupe qui dispose des revenus les plus faibles est celui des praticiens réalisant essentiellement des actes dits « intellectuels », omnipraticiens, pédiatres, dont les revenus oscillent entre 310 000 et 350 000 francs.

Analysant les honoraires des médecins généralistes, Marc Beudaert remarque qu’ils évoluent en « dos de mammouth » à partir de la première installation du praticien. Faibles en début de carrière, les honoraires atteignent généralement un pic après une vingtaine d’années pour décroître ensuite en fin de carrière. En raison de l’instauration du numerus clausus, l’année d’installation joue un rôle important. Maximum pour les promotions installées avant 1975, le montant moyen des honoraires a décliné avec l’afflux de médecins des années 70 et 80 et tend à remonter pour les promotions les plus récentes. Pour ces dernières, l’auteur constate un resserrement de l’éventail des honoraires par la remontée de niveau des médecins à faibles revenus.

Dans les hôpitaux français, 7 500 médecins à diplômes non européens exerçaient en 1995, soit plus d’un praticien sur dix. À la date de l’enquête, selon Magali Coldefy, ces médecins déploraient la précarité de leur statut, leurs conditions d’exercice et exprimaient majoritairement le souhait de changer d’activité professionnelle dans un futur proche. Depuis, la loi Veil a régularisé leur situation en leur donnant un statut de praticien adjoint contractuel.

Dans son « Point stat », Françoise Jallet fait le point sur les personnels médicaux exerçant dans les établissements de santé. Le CHR reste leur principal employeur et les services de soins de courte durée leur principale affectation.

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