Cette étude mobilise la base du Système national d’information interrégimes de l’Assurance maladie (Sniiram) du SNDS. Cette base contient les données sur les soins de ville remboursés par l’Assurance maladie et des informations sur les professionnels ayant assuré ces soins. Tous les patients de moins de 18 ans ayant eu au moins un recours à un orthophoniste en 2019 ont été sélectionnés dans cette étude. Seules les consultations réalisées en cabinet de ville ont été considérées, qu’elles aient été assurées par un orthophoniste ayant une activité exclusivement libérale ou mixte.
Des différences de recours selon le sexe : les garçons plus nombreux et plus jeunes que les filles dans la patientèle des orthophonistes
En 2019, en France (hors Mayotte), près de 1 250 000 enfants ou adolescents de moins de 18 ans ont consulté au moins une fois un orthophoniste (soit près de 9 % de la classe d’âge), pour plus de 21 millions de consultations au cours de l’année. Pour la moitié d’entre eux, ils sont âgés entre 6 et 10 ans et sont scolarisés à l’école primaire. Les garçons consultent davantage que les filles (59 % versus 41 %) et recourent plus jeunes à l’orthophoniste : les âges les plus représentés sont 5 et 6 ans chez les garçons et 8 et 9 ans chez les filles (graphique ci-dessous).
Des motifs différenciés selon l’âge : les troubles du langage oral principal motif de consultation des enfants de 3 à 10 ans
La rééducation pour une pathologie du langage oral concerne plus de huit enfants sur dix ans âgés de 3 à 5 ans parmi ceux ayant consulté un orthophoniste en 2019. Ce pourcentage diminue pour les enfants scolarisés à l’école primaire (6-10 ans) mais les pathologies du langage oral restent le motif le plus répandu (43 %) devant les pathologies du langage écrit (37 %). À partir de l’école primaire, un nouveau motif de consultation apparaît : les troubles logico-mathématiques qui se définissent par le retard ou l’absence des structures logiques nécessaires à l’apprentissage du nombre et au raisonnement mathématique. Ce motif concerne un peu plus de 4 % des consultations des enfants âgés de 6 à 10 ans (graphique ci-dessous).
Les adolescents consultent davantage pour des pathologies du graphisme et du langage écrit
Parmi les jeunes de 11 à 17 ans qui ont consulté au moins une fois un orthophoniste en 2019, 57 % ont comme motif principal de recours une pathologie du graphisme et du langage écrit telle que la dyslexie ou la dysorthographie. Les pathologies du langage oral se trouvent reléguées au deuxième rang, loin derrière, avec moins de 13 % des adolescents pris en charge. Les troubles logico-mathématiques comme motif principal de consultation progressent, relativement aux autres motifs, à l’âge du collège et du lycée : ils concernent près de 10 % des adolescents qui recourent à un orthophoniste.
À âge égal, garçons et filles ne consultent pas pour les mêmes motifs
Entre 3 et 5 ans, les motifs de recours sont pratiquement les mêmes entre les filles et les garçons, bien que ces derniers consultent presque deux fois plus souvent à ces âges. Plus âgés, entre 6 et 10 ans, les filles sont plus fréquemment concernées par les troubles logico-mathématiques que les garçons (7 % contre 3 %), ces derniers étant davantage pris en charge pour des troubles liés au bégaiement (2 % contre 1 %), à la dysphasie (4 % contre moins de 3 %) ou encore à la rééducation de la communication et du langage dans les handicaps moteur, sensoriel ou les déficiences intellectuelles (7 % contre 5 %). À l’adolescence, les garçons de 11 à 17 ans consultent plus souvent pour des pathologies du langage écrit. Les filles recourent davantage pour les troubles logico-mathématiques.
Des inégalités d’accès et de recours aux orthophonistes selon les départements
Au 1er janvier 2019, la France compte 22 951 orthophonistes de moins de 62 ans en activité, dont 97 % de femmes. En rapportant le nombre d’orthophonistes libéraux ou mixtes de moins de 62 ans aux enfants et adolescents de moins de 18 ans qui constituent la grande majorité de la patientèle des orthophonistes, la densité moyenne d’orthophonistes en France s’élève à 135 pour 100 000 mineurs mais ce taux est très hétérogène d’un département à l’autre. Sur le territoire métropolitain, il varie de 40 orthophonistes pour 100 000 enfants dans le Cantal jusqu’à 255 professionnels dans l’Hérault et 228 à Paris. La moitié des départements sont dotés de moins de 104 professionnels pour 100 000 jeunes. Dans les départements d’outre-mer (DOM), La Réunion est particulièrement bien dotée avec une densité de 190 orthophonistes pour 100 000, soit un taux supérieur à la moyenne nationale. À l’inverse, le département de la Guyane est fortement déficitaire avec une densité de 19 pour 100 000. Les départements de la Guadeloupe et de la Martinique se situe dans une position intermédiaire, avec des densités qui s’établissent respectivement à 128 et 119 pour 100 000 mineurs.
En excluant les mineurs ayant eu uniquement un bilan orthophonique sans prise en charge, le taux de recours à l’orthophoniste libéral s’élève à 75 pour 1 000 enfants ou adolescents de moins de 18 ans en France. C’est en Meurthe-et-Moselle, dans le Rhône et dans le Nord que les jeunes recourent le plus souvent à l’orthophoniste avec des taux supérieurs à 120 pour 1 000 jeunes. Les recours les plus faibles sont observés en Seine-Saint-Denis, dans le Cher et les Deux-Sèvres avec des taux inférieurs à 40 pour 1 000 jeunes. La ville de Paris, en dépit de sa densité élevée en orthophonistes, présente un taux de recours de 63. Comparée aux autres départements, la proportion de jeunes patients qui consultent à Paris mais qui résident hors du département, est plus importante. Ce constat pourrait expliquer le décalage entre le nombre d’orthophonistes et le nombre d’enfants parisiens y recourant.
Dans les DOM, La Réunion a un taux de recours égal à 83 pour 1 000 enfants alors que la Guadeloupe et la Martinique présentent des taux inférieurs (respectivement 64 et 59). Quant à La Guyane, elle affiche le taux de recours le plus bas (7), en adéquation avec sa faible densité d’orthophonistes. La grande diversité linguistique de sa population peut être une barrière à la prise en charge.