L’aide sociale à l’enfance - Édition 2024

Les dossiers de la DREES

N° 119

Paru le 23/07/2024

Tedjani Tarayoun, avec Élisa Abassi, Cheikh-Tidiane Diallo, Klara Vinceneux (DREES)
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) publie une étude qui rassemble et synthétise de nombreuses données statistiques disponibles sur l’aide sociale à l’enfance (ASE). Cette étude dresse notamment un état des lieux détaillé des différentes mesures mises en place, des caractéristiques des bénéficiaires et des dépenses des départements. Elle s’appuie pour cela sur plusieurs sources de données, notamment l’enquête Aide sociale réalisée chaque année par la DREES auprès des départements. Cette étude présente également les premiers résultats de l’enquête auprès des établissements et services de la protection de l’enfance (ES-PE) menée en 2022. Elle analyse les tendances nationales et les disparités départementales.


Au 31 décembre 2022, les mineurs et majeurs de moins de 21 ans bénéficient de 381 000 mesures d’aide sociale à l’enfance (ASE). Plus de la moitié d’entre elles (55 %) sont des mesures d’accueil en dehors du milieu de vie habituel ; le complément (45 %) correspondant à des actions éducatives exercées auprès du jeune ou de sa famille (intervention à domicile d’un travailleur social). Les mesures sont, le plus souvent, mises en œuvre à la suite d’une décision judiciaire (70 % des actions éducatives et 78 % des mesures d’accueil à l’ASE).

Une hausse des mesures d’ASE portée par l’augmentation des mesures d’accueil

Entre fin 1998 et fin 2022, le nombre de mesures d’ASE a été multiplié par 1,4. Le nombre de mesures d’ASE rapporté au nombre de jeunes de moins de 21 ans augmente régulièrement au cours de cette période, passant de 16,6 pour 1 000 jeunes fin 1998 à 22,9 ‰ fin 2022 (graphique ci-dessous). Bien que le nombre de mesures d’accueil ait augmenté dans la même proportion que celui des actions éducatives (multiplié par 1,4) entre fin 1998 et fin 2022, le premier contribue à 83 % de la hausse totale du nombre de mesures depuis fin 2015. 
Fin 2022, 208 000 mineurs et jeunes majeurs sont accueillis à l’ASE, soit +1,7 % sur un an, après avoir augmenté de +2,4 % en 2021 et de +1,4 % en 2020. Le nombre d’accueils à l’ASE avait connu une progression d’ampleur inhabituelle entre fin 2015 et fin 2019 (+4,7 %) en raison principalement de l’importante augmentation du nombre de mineurs non accompagnés (MNA) et de jeunes majeurs anciennement MNA au cours de cette période (+29 % par an en moyenne).

Le nombre de jeunes pris en charge par l’ASE au-delà de leur majorité en repli

Fin 2022, 31 000 jeunes majeurs bénéficient d’un accueil provisoire jeune majeur. Ce nombre diminue de 3,7 % en 2022, après avoir fortement progressé entre 2018 et 2021 (+21 % en moyenne par an). Cette forte augmentation résulte de la mise en place de mesures spécifiques visant à prolonger la prise en charge des jeunes majeurs dans le contexte de la crise sanitaire d’une part et dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, amorcée dès 2018 d’autre part. La baisse du nombre de jeunes majeurs observée en 2022 concerne en premier lieu les jeunes majeurs anciennement MNA (-11 % entre fin 2021 et fin 2022). En effet, le nombre de MNA pris en charge a fortement diminué pendant la crise sanitaire, du fait de la chute des flux migratoires (-20 % en moyenne par an entre fin 2019 et fin 2021), ce qui s’est traduit en 2022 par une baisse du nombre de jeunes majeurs anciennement MNA.

Graphique – Évolution des mesures d’aide sociale à l’enfance au 31 décembre, de 1996 à 2022


L’accueil chez une assistante familiale n’est plus la modalité de prise en charge la plus fréquente


Fin 2022, 38 % des enfants confiés à l’ASE sont accueillis chez des assistantes familiales, contre 56 % à son maximum en 2006. Les établissements habilités constituent, pour la première fois, la modalité d’accueil la plus fréquente (41 % fin 2022). 
Les 21 % restants sont accueillis différemment (hébergement autonomes, placements à domicile, tiers bénévole, attente de lieu d’accueil, future famille adoptante). Cette répartition varie néanmoins selon l’âge des enfants accueillis. Ainsi, deux tiers des enfants âgés de 3 à 5 ans sont accueillis chez une assistante familiale contre seulement 19 % des 16-17 ans, davantage accueillis en établissement (56 %), en structures d’accueil pour adolescents autonomes (12 %) ou au travers d’autres modalités d’accueil (14 %).
Fin 2021, selon l’enquête auprès des établissements et services de la protection de l’enfance (ES-PE), 74 100 enfants et jeunes majeurs sont accueillis par l’un des 2 137 établissements de l’ASE. Ces derniers disposent de 79 900 places, une capacité d’accueil en hausse de 23 % par rapport à 2017. Le taux d’encadrement dans ces structures s’élève à 79 emplois, en équivalent temps plein, pour 100 places. 
Fin 2021, 15 % des jeunes accueillis dans un établissement de l’ASE disposent d’une reconnaissance administrative d’un handicap par une maison départementale des personnes handicapées, soit près de 11 000 jeunes. 
Parmi les enfants hébergés fin 2021, 40 % des enfants de 11 ans, en âge d’aller au collège, sont scolarisés à l’école primaire.

Des taux de mesures d’aide sociale à l’enfance hétérogènes selon les départements

Au niveau national, le taux de mesures d’ASE est de 22,9 mesures en moyenne pour 1 000 jeunes de moins de 21 ans fin 2022, mais varie fortement selon les départements. Un peu plus de la moitié des collectivités présentent un taux compris entre 20 ‰ et moins de 30 ‰. 
La proportion de mesures d’ASE faisant suite à une décision judiciaire varie sur le territoire, révélant des pratiques diverses. Ce constat est cependant davantage marqué pour les actions éducatives. La part d’aides éducatives à domicile (AED, relevant d’une décision administrative) dans l’ensemble des actions éducatives varie selon les départements de moins de 10 % à plus de 70 %.

Des dépenses d’aide sociale à l’enfance largement consacrées au financement des mesures d’accueil

En 2022, les départements ont consacré 9,9 milliards d’euros à la protection de l’enfance. Ce montant, dédié à hauteur de 80 % aux mesures d’accueil à l’ASE, permet également de financer le versement d’allocations, la mise en œuvre d’actions éducatives, ainsi que des actions de prévention spécialisée.
Entre 1998 et 2022, les dépenses totales d’ASE ont été multipliées par 2,3 en euros courants, soit une augmentation de 61 % en euros constants, c’est-à-dire en tenant compte de l’inflation. Cette hausse est essentiellement portée par celle des dépenses d’accueil à l’ASE (+91 % en euros constants au cours de la même période).
En 2022, la dépense annuelle d’accueil par bénéficiaire est de 38 200 euros au niveau national. Des disparités départementales peuvent apparaître en lien avec la répartition des modalités d’accueil. Les dépenses d’accueil par bénéficiaire ont ainsi tendance à être plus élevées dans les départements qui recourent davantage aux placements en établissement ou aux autres modes de prise en charge hors famille d’accueil. La dépense annuelle moyenne par bénéficiaire est bien moins élevée lorsqu’il s’agit d’une action éducative : 3 400 euros au niveau national, en 2022.

Des données plus récentes à paraître bientôt

Les données concernant les mesures et les bénéficiaires de l’aide sociale à l’enfance fin 2023 ainsi que les données nationales provisoires sur les dépenses d’aide sociale de cette même année sont à paraître fin 2024.
Un Dossier de la DREES présentant les principaux résultats de l’enquête auprès des établissements et services de la protection de l’enfance (ES-PE) menée en 2022, sera publié le 30 juillet 2024. Les données complémentaires détaillées de cette enquête seront publiées ultérieurement.

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